Paul Sanda

Les travaux de la nuit, hommage à Alejandra Pizarnik, de Paul Sanda.

Version bilingue, traduction en espagnol de Miguel Ángel Real.

Editions Alcyone (collection Surya)

ISBN : 978-2-37405-055-3

Né en Vendée en 1961, Paul Sanda est poète, vociférateur et plasticien. Auteur d’une vingtaine de recueils poétiques, il a notamment publié Elle saigne à la Lanterne (Syllepse, 2003), Racines Profondes (Arma Artis, 2008), et Célébration des Nuées (Rafael de Surtis, 2016). Sa poésie est magnifiée dans la monographie des Têtes Raides chez Seghers. Parmi ses derniers essais parus : Les Surréalistes et la Bretagne (avec Bruno Geneste, Editinter, 2015), et L'Alchimie secrète en la Voie Sacerdotale (Rafael de Surtis / Editinter, 2018) permettent de saisir son monde poétique, imprégné d'hermétisme et de surréalisme, mais aussi sa connaissance élevée de l'ésotérisme occidental.

Le présent recueil est un hommage profond à la poésie essentielle et subtile d'Alejandra Pizarnik. Paul Sanda, qui s'est imprégné du mystère et des secrets cachés dans les vers du grand écrivain argentin, donne ici sa propre version de ce que la poésie fondamentale peut exiger de l'être vrai. Ainsi, dans une dimension concise et acérée, provoque-t-il la vie jusqu'à la béance. Dans Les Travaux de la Nuit, l'élévation intime est justement sanctifiée, parce que la poésie, dans sa dimension ritualisée, y est vécue comme partie intégrante de la divinité (quel qu'en soit le nom) et, surtout, de cette nécessité de paix que la quête doit irrémissiblement édifier...

Vous pouvez écouter des poèmes de Paul Sanda en cliquant sur la flèche du fichier MP3, en bas de page. 

 

TEXTES

 

Poème
Écoute, ce qui se tend sous notre nuit – la mer, Alejandra,
& une église où le temps va s'attarder. Pour le poème,
c'est aux flots & aux nuits, aux ombrages que la chair
va pleurer ; notre joie se purifiera dans la beauté...

Poema
Escucha lo que se tiende bajo nuestra noche – el mar, Alejandra,
& una iglesia donde va el tiempo a demorarse. Para el poema,
la carne va a llorarle a las olas & a las noches,
a las sombras; nuestro gozo se purificará en la belleza...

*
Révélations
Nos hésitations, nos amours, nos bonheurs étranges,
ce que nous avons voulu dans les travaux de nos incertitudes :
voilà que je pense à tes épaules oubliées en amoureux vestiges...

Notre histoire est la révélation choisie,
parce que le flux ne peut nous faire souffrir.

Revelaciones
Nuestras dudas, nuestros amores, nuestras dichas extrañas,
lo que quisimos en los trabajos de nuestras incertidumbres:
ahora pienso en tus hombros olvidados en amorosos vestigios...

Nuestra historia es la revelación elegida,
porque el flujo no puede hacernos sufrir.

*
En ton anniversaire
Nos nuits très bleues ne seront jamais les mêmes –
mais crois-tu que nous reverrons notre sanctuaire, nostalgique
& mémoriel ? Qu'ainsi je puisse déverser la prière jusqu'à toi....

En tu aniversario
Nuestras noches muy azules nunca serán las mismas -
¿pero crees que volveremos a ver nuestro santuario, nostálgico
y memorioso? Que así pueda yo hasta ti verter el ruego...

*
Amants
En vérité, c'est que nos amours sont suspendues...
Dans les contrées de notre alcôve, voilà que
mon corps accorde nos archets, nos alliances
& ton étrange asthénie... ; mais je sens pourtant que
la langueur de ta peau sera trop recherchée.

Amantes
En verdad, están nuestros amores suspendidos...
En las comarcas de nuestra alcoba, está
mi cuerpo acordando nuestros arcos, nuestras alianzas
& tu extraña astenia...; y sin embargo siento que
la languidez de tu piel será muy anhelada.

*
À qui éclaire
& nous laissions flotter – jusqu'à ne jamais penser
à nos baisers de feu – ce que nous ne savions dire.
Il n'y avait plus de peur, ni de vide,
simplement, il faisait beau sur le jardin.
Le lampadaire dérivait au chant des cordes,
& notre lumière subtile balayait les rameaux.
L'éclair prenait l'interstice entre nos mains...

Quien alumbra
& dejábamos flotar – hasta no pensar nunca
en nuestros besos de fuego – lo que no sabíamos decir.
No había ya miedo, ni vacío,
simplemente, hacía bueno en el jardín.
La farola derivaba con el canto de las cuerdas,
& nuestra luz sutil barría los ramos.
El rayo ocupaba el intersticio entre nuestras manos...

*
Reconnaissance
Tu sais voler en plein ciel, au-delà de mes sens ;
tu es la sensation qui emporte & qui porte, & qui sombre,
je ne suis que l'étoile qui erre depuis le premier jour.
Sur le même quai, je te reconnais invariablement :
tu fais semblant d'être vague, dans la folie des marées...

Reconocimiento
Sabes volar en pleno cielo, más allá de mis sentidos;
eres la sensación que transporta y que porta & que zozobra,
yo no soy sino la estrella que desde el pimer día vaga.
En el mismo muelle, te reconozco invariablemente:
finges ser ola, en la locura de las mareas...

*
Présence
Tu penses à mes yeux de corail,
comme on s'élève vers les anges :
je songe à ton sein inlassablement,
sans rêver à la mer qui te dépouille de tes mystères...
Ô ma basilique, comme j'aimerais que
nous reprenions notre éveil.
Tu penses à mes yeux de corail,  
je le vois dans le faste de tes gestes –
la précision de ta main dans les fleurs,
& l'âcre désir, dans ton sang sur le lit.  

Presencia
Tú piensas en mis ojos de coral
como uno se eleva hacia los ángeles:
yo pienso en tu seno incansablemente,
sin soñar en el mar que te despoja de tus misterios...
Oh basílica mía, cómo quisiera que
retomáramos nuestro despertar.
Tú piensas en mis ojos de coral,
yo lo veo en el fasto de tus gestos –
la precisión de tu mano en las flores,
& el acre deseo, en tu sangre sobre el lecho.

*
Rencontre
Presse ma main perdue, dans les coussins du silence,
& suis ma solitude de ton cœur blessé :
c'est ta nuit que j'entends dans cette mélodie qui passe,
le bruit cruel de tes ongles glissant sur la faïence...

Encuentro
Aprieta mi mano perdida, en los cojines del silencio,
& sigue mi soledad con tu corazón herido:
es tu noche lo que oigo en esta melodía que pasa,
el ruido cruel de tus uñas deslizándose sobre la loza.


Extraits de Les travaux de la nuit,
Hommage à Alejandra Pizarnik
de Paul Sanda
Copyright : Editions Alcyone
Version bilingue : traduction en espagnol de
 Miguel Ángel Real
Copyright : Editions Alcyone

 


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Les travaux de la nuit

Hommage à Alejandra Pizarnik

de Paul Sanda

Version bilingue, trad. en espagnol de

Miguel Ángel Real.

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Poèmes de Paul Sanda dits par Silvaine Arabo

Paul Sanda

Paul Sanda

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Paul Sanda

49 MARCHES PRÉCÉDÉ DE PSAUMES DE PROUE DE JOUES & DE BEAUTÉ

PAUL SANDA

EDITIONS ALYONE

Né en Vendée en 1961, Paul Sanda est poète, vociférateur et plasticien. Auteur d’une vingtaine de recueils poétiques, il a notamment publié Elle saigne à la Lanterne (Syllepse, 2003), Racines Profondes (Arma Artis, 2008), et Célébration des Nuées (Rafael de Surtis, 2016). Sa poésie est magnifiée dans la monographie des Têtes Raides chez Seghers. Parmi ses derniers essais parus, Les Surréalistes et la Bretagne (avec Bruno Geneste ; Editinter, 2015), et L'Alchimie secrète en la Voie Sacerdotale (Rafael de Surtis / Editinter, 2018) permettent de saisir son monde poétique, imprégné d'hermétisme et de surréalisme, mais aussi sa connaissance élevée de l'ésotérisme occidental.

 **

Les 49 marches sont les 49 mots qui composent le Pater que l’on récite sur le chemin de Saint-Jacques dans le village de Cordes. Il s’agit de monter jusqu’au père au sexe mixte. Il s’agit uniquement d’inventer un ventre, une tripe anagrammatique de l’esprit, le secret d’un nom qu’on accuse dans ses lettres, ou dans un souffle.

Comment rendre public le Nom est le sens de ce chant. Un rituel de passage.

Dans les mots de Paul Sanda règne le poème d’une théologie de la chair.

Toute mort réveillée est une incarnation et le poème crache des voyelles sur les consonnes qui jouent dans le silence.

C’est le sens de la pierre que l’on trouve poussée devant l’entrée du tombeau, comme le bouchon d’une oreille.  Serge Pey

 

TEXTES

I.

ah les éclats des goélands des

fous criards qui grincent contre la proue

c'est tous les matins du monde

comme le chœur lent se frotte & se hèle

grève contre le bois dans le plat de ses ailes

ô c'est la craie des varechs c'est la

hargne d'enfance c'est que j'ai le sens

en désaccord suintant de ton cri

si délicat & pourtant tant injuste à ton

ventre de femme

**

X.

la proue se joue de nous

dans la pluie la bourrasque

c'est l'imperméable

de cet amour délaissé

j'échappe à tes reins de

bois & de nuages comme

rien jamais ne menacera notre

pluie ah oui je suis ton horizon

ton murmure & ton

échappée dis-moi que

rien ne nous menacera

**

XVII.

les éclats des oiseaux criards

renâclent & puis grincent à la proue :

tous le matins du monde

le chœur est lent & puis se frotte & puis

chuinte contre le bois de ton bois

à plat d'ailes & de craie je t'aimerai

houle d'insectes je t'aimerai jusqu'à rire

c'est que je t'aimerai dans ta vieillesse

d'un désaccord grinçant

si délicat & puis si juste ce sera

pour la femme & pour son bois

pour ma proue ô toi ma femme

Extraits de Dix-sept Psaumes

de Proue de Joue & de Beauté

Paul Sanda

© Editions Alcyone

**

Extraits de 49 Marches, Paul Sanda 

 

5, (depuis l’intérieur en effet)

Garde-moi, oui protège-moi, j’ai

sonné la mauvaise cloche, celle des

échecs, aux carreaux de notre voie ;

concordance en mon abri (tombeau),

le mélange depuis l’intérieur se nomme

le sort – & je parcours tes paysages

dépouillés – depuis toi qui es en moi :

(ô prière, & l’ange au-dessus de nous)

Dans ma poche à souvenir : voilà que j’ai 

récupéré le canif ancestral du grand-père, 

mon Cingria, mon Charles-Albert à moi

**

6, (à l’appui du ciel)

& des arbres de la plus belle candeur,

se blottissaient dans la veine de mon  

appréhension, de ma volonté, 

de la préparation de ce qui se 

conserverait-là pour la fin :

ordonner une élévation plus générale,

de sorte qu’en me lisant, ta frontière

– pour que tu sois irremplaçable dans

ta perfection (sur la glaise) – ta limite,

me percute, en un vertigineux abîme ;

(alors) s’il te plaît, ne t’appuie pas,

ne te conforme pas à ma satiété

**

7, (& ce qui doit être sanctifié)

Quel œil ne s’est pas enflammé devant

la splendeur des roses sur ta robe – &

dans l’exaltation de cette aurore,

en partie éclaboussée ;

ta main à la ceinture (de sainteté ?)

parce que tu avais trébuché sur la bordure,

& que la projection n’avais pas su fournir

la bise, l’ardeur, le moteur & l’ambiguïté :

à quoi penserai-je, en voyant nos instants

si vides, & en essuyant le poème détruit ?

**

12, (parce que c’était le tien – encore)

Le temps –un mur ; le temps d’après :

je savais ton retour dans l’alcôve,

j’avais une nouvelle lettre pour toi ;

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le vent d’éveil s’élança de la couche

(nous observions les oiseaux qui

dans les ramures des rosiers grimpants

nous chantaient le dernier soleil

du jour), & notre lien qui s’incrustait...

**

17, (au plus profond sommes-nous)

& quant au plus profond tu seras éveillée

(depuis la tragédie de ce que

nous avions projeté de l’étoile) :

aux vers de Swinburne, je me

cacherai dans le livre occulte de

tes broussailles : je reviendrai à l’appel

de ce néant presque heureux que nous 

ne voulions surtout pas éprouver…

Extraits de 49 Marches, Paul Sanda 

© Editions Alcyone 

 

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49 MARCHES PRÉCÉDÉ DE PSAUMES DE PROUE DE JOUES & DE BEAUTÉ

PAUL SANDA

EDITIONS ALCYONE

19,00€ (+ port/emballage 04,00€)



Lecture du recueil 49 MARCHES PRÉCÉDÉ DE PSAUMES DE PROUE DE JOUES & DE BEAUTÉ de Paul Sanda, par Éric Chassefière

Il y a ce vent qui tourmente l’automne, l’enchainement silencieux au père, le besoin de se libérer de quelque chose qu’on ne peut pas nommer, l’énigme dont on se saisit pour advenir, différemment, par un autre chemin : « comment pourrais-je / un jour créer depuis le fond de moi ? », ce besoin d’écrire d’une main neuve, loin du ressassement des silences anciens. Cela qu’au-dessus de l’automne, Paul Sanda, dans la quête de sa vérité propre, a placé cette « aspiration, en réciprocité : le poème, / épicurien, sensuel, sexuel, dans l’arête / directe, précise – complimenteur, / de ce fastueux ravissement ». Poème dont le vent seul venu de la mer est au fond des yeux capable de sécher l’encre, poème, peut-être, dont l’inscription durable au parchemin de l’être naît de la confrontation avec les éléments. Poème de l’énigme patiemment disséquée, de l’élévation conjointe « en un vertigineux abime », poème-labyrinthe de ces 49 marches que le poète nous convie à gravir à ses côtés, dans sa ville de Cordes sur Ciel, vers quelque chose comme la vie, vie « comme aucune vie », vie de l’exaltation de l’aurore et de l’embrasement des sens, porteuse de la faute comme de la rédemption. Création sans fin de la mort que cette étreinte charnelle de l’homme et de la femme dévorés de pulsion érotique : « Il y a assez d’obstination en nous / pour que l’abri de notre sépulcre / accepte de se creuser de lui-même ». Et le poète de dire le corps aveugle dans le déchainement du désir : « & tes yeux, contre la ténacité de l’inspir / - dans la dispersion de la folie / charnelle – contre ma myopie, / & contre ta cécité » et cet avenir rejeté « entre les doutes & l’enfer », car jamais rien n’est éternel. Splendeur, nous dit le poète, de « ce qui de la peine crée la vie, / ce qui de la douleur crée l’impensable / ce qui du cercle éternel crée / un temps suspect, décroché... », signe peut-être que « le fil est cassé, / le fil de la connexion à l’âme / à notre Dieu lui-même ». Splendeur générant sa propre défaillance. « Il n’y avait plus de possibilité d’être vrais, / ni le jour ni la nuit sous les décombres », celles qu’a provoquées l’ébranlement par le péché, la soumission à un désir qui ne s’apaise que de s’accomplir. Erreurs mesurées, longtemps répétées, sans que se dessine l’échappée. Puis l’amour enfin réalisé, le repentir :

Depuis l’éden, notre dernier pôle d’ombre s’ouvrait (dans la foi, dans l’évocation voulue comme remède) ; Dieu nous savait dans l’ambiguïté, comme des cadavres si prévisibles :errants, & selon ce qui ne sera pas ;

enfin nous nous aimions – enfin (autour de ce puits-là) & je trouvai la force d’épeler la dissolution, si complexe, de la faute – dans la contrition

« Dormir, appuyés (si réservés / étions-nous depuis l’enfance) / dans les escarres de nos solitudes / - le poème sera notre dernier repas, / dans l’ascèse, ou dans la cruauté ». Poème, peut-être, d’une "théologie de la chair", pour reprendre les mots de Serge Pey dans sa préface.

Cruauté, probablement, du renoncement à la jouissance, car « notre étreinte pleure, sur ce verbe-là / sur ce qui venait expirer entre nos mains » et, poursuit le poète : « le réel du monde me semble étendu / devant moi, comme un jardin mort ». Le réel, peut-être, comme bonheur à la source de l’extase, impliquant un don total de soi. L’emmurement du cœur dans l’union des corps : la fracture, le deuil (« ma vraie nécessité »), cette autre, mutique, qu’on ne peut vraiment atteindre dans l’embrasement : « Ne pas pleurer, ne pas ressentir, ne pas vouloir – la désolation / est bien trop forte (les mots ?) ». Peut-être alors la mémoire, la douceur des mots là où la joute se tait, les secrets échangés, l’alliance légère (du corps et de l’esprit ?), « la danse au profond des choses vitales », quelque chose qui dans l’apaisement passe de vie à vie, de corps à corps. « Compassion pour le corps ». Le poète, dans le même temps astronome et marbrier, ouvre l’univers avec la tombe, la pensée avec le corps, dans son amour il se défait de tout. Inconcevable temps de l’amour. « Nos infractions physiques (lascives) / nous faisaient nommer pécheurs / (porteurs de croix impénitents) - / mais nous n’oubliions pas que notre / sang pouvait se joindre à la volupté ». Et ce partage par le sang, n’est-il pas révélation qui s’incarne, fruit de la liberté souveraine de celui qui « se décide au sexe, dans la / foi, pour ceux qui savent entendre » ? Entendre Dieu, entendre l’autre à travers Dieu. Corps en miroir, ou comme s’unissent deux flux de vie : « ce qui était nécessaire en toi, c’était / notre reflet, c’est la seule souveraineté / que j’ai pu admettre jusqu’à présent ». Exaltation d’abord, chez Paul Sanda, de la liberté, cette « part de force » en nous de « la pierre la plus dure – ou bien rien », celle qui nous fait rechercher la pulsion qui élève, loin de toute certitude et tout jugement. Mais il y a la ruine progressive de la chair, ce long crépuscule d’un déchirement désynchronisé entre les corps, la terrible nostalgie étreignant le poète dans sa chair à l’égal de la fusion passée : « tu sais ma lassitude devant la quête : / & que te retrouver si densément va /rester définitivement incertain ». La réparation du corps, l’éternel retour, sont-ils encore possibles ?

Le poète confie avoir voulu renoncer, dans le silence, en une « cérémonie de consolation (sans aucune / erreur, sans aucune faute) », guérir et s’endormir, pour au réveil entrevoir un futur. « Pour des chants nouveaux, il faut toujours / une harpe nouvelle ( ce qui se détache alors /c’est la force vitale – allégorique / & sanglante) ». Mort et résurrection :

Tout se brise, & tout s’assemble à nouveau : l’amour éternellement se bâtit (c’est le même édifice en des corps différents)...

Tout se sépare, se mêle à nouveau, un ressac, un rythme, une succession qui s’imprime & dépasse l’entendement

& puis dans le soleil je me coucherai, pour assumer notre éternité

« Mourir en un instant », tel est l’elliptique sous-titre de l’ultime poème, celui qu’on prononce à la quarante-neuvième marche, texte sacré en main : « notre déluge / ou bien mourir en un /instant ; la morsure de notre fusion si / extravagante : & puis (évidemment) / retrouver ton âme au-delà, / dans l’intervalle ». Dernier poème, peut-être, avant la croix. Poème pour le partage du pain et l’apaisement. Liberté d’être ensemble qui s’accomplit en acte, car il n’existe pas de vérité intangible. Seulement le partage, le pain du poème.